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Le droit au compte répond à « l'objectif d'intérêt général de lutte contre les situations d&

Conseil d’Etat, 10 septembre 2014, n° 381183

Les conventions conclues entre un individu et un établissement bancaire sont qualifiées de contrats intuitu personae, ces dernières étant passées en considération de la personne même du cocontractant. Aussi, il est logique que le banquier puisse avoir la liberté de choisir l’autre partie, le lien de droit les unissant étant fondé sur un rapport de confiance.


L'ouverture d'un compte bancaire n'échappe pas au principe. Cependant, cette liberté reconnue au banquier s'est vue limitée par l’article L.312-1 du CMF, aux termes duquel « toute personne physique ou morale domiciliée en France, dépourvue d'un compte de dépôt, a droit à l'ouverture d'un tel compte dans l'établissement de crédit de son choix […] ».


Ces dispositions constituent le fondement même du droit au compte, outre le droit aux services bancaires de base. Ce droit au compte a donné lieu à une question prioritaire de constitutionnalité (QPC) devant le Conseil d’Etat qui – en tant que juridiction de filtrage conformément à l’article 61-1 de la Constitution – s’est prononcé sur son caractère sérieux aux fins d’une éventuelle transmission au Conseil constitutionnel.


En l’espèce, une banque s’opposait à la décision de la Banque de France par laquelle l’une de ses agences se voyait contrainte d’ouvrir un compte au profit d’une société civile immobilière (SCI).


Selon la banque, les dispositions de l’article L.312-1 du CMF sont contraires au principe de liberté contractuelle du banquier, principe ayant valeur constitutionnelle (art. 4 DDHC). En outre, l’établissement bancaire soutenait qu’aucun motif d’intérêt général ne justifie que ce droit au compte bénéficie aux personnes morales ayant un but lucratif.


C’était, toutefois, sans compter sur l’appréciation du Conseil d’Etat pour qui les dispositions de l’article L.312-1 du CMF répondent à « l'objectif d'intérêt général de lutte contre les situations d'exclusion bancaire dans un contexte où la généralisation de l'utilisation des virements, notamment pour le versement de salaires et de prestations, rend indispensable la détention d'un compte bancaire ».


S’agissant des personnes morales à but lucratif, le Conseil d’Etat précise que « cet objectif d'intérêt général vise à faciliter l'activité de petites entités économiques telles que des micro-entreprises ou des entreprises unipersonnelles, qui peuvent rencontrer des difficultés d'accès aux banques, alors même que la détention d'un compte bancaire est essentielle à leur activité ». Ainsi, les dispositions de l'article L.312-1, qui limitent ce droit au compte au seul compte de dépôt, « encadrent strictement les conditions dans lesquelles un tel compte peut être ouvert et prévoient que l'établissement désigné peut clore le compte qu'il a été obligé d'ouvrir, à condition d'adresser une notification écrite et motivée au client et à la Banque de France, et de consentir un délai minimum de deux mois au titulaire du compte ».


Dès lors, pour le Conseil d’Etat le moyen tiré de ce que les dispositions de l'article L.312-1 du CMF porteraient une atteinte disproportionnée à la liberté contractuelle est dépourvu de caractère sérieux.




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